"Le gouffre sans fin [ECE]" par Clara M. ~ Tristesse, Horreur ...

Il fait noir ... Très noir ... Voir trop. C'est quoi le noir ? C'est sans aucun doute ce qui n'est pas blanc ... Mais encore faudrait - t'il savoir ce que c'est, le blanc ...

Où suis - je exactement ? Je l'ignore malheureusement. Je n'ai aucun souvenir, je tombe dans ce néant depuis longtemps, trop longtemps. J'aimerais m'enfuir mais je ne peux pas. Une puissante gravité m'attire contre mon gré vers quelque chose de dangereux, mais je ne sais pas quoi.

Des secondes, des minutes, des heures, des journées entières que je plonge dans cet abysse sans fin. Quand cela s'arrêtera - t'il ? Que peut - il donc y avoir au fond de ce trou noir infini ? Un sol ? Cela m'étonnerait, je tombe depuis trop longtemps pour qu'il y en ait un. 

Mon coeur ne bat plus, ou faiblement. Je n'ai plus la force de bouger. Mes cheveux couleur ébène volent autour de moi, irrémédiablement attirés par quelque chose d'inconnu. 

J'ai peur. Je tremble. Comment être sûre de sortir un jour de cet endroit lugubre sans y perdre la vie ? Car comme tout être humain je vieillis.

Mais suis - je humaine ? Je ne le sais même pas. J'en ai la forme certes, mais comment savoir si je suis une Terrienne après tant d'années passées à patienter, attendre que l'on me sorte de là.

De douces gouttes salées coulent le long de mes joues. Je pleure. Mon visage nimbé de larmes n'exprime aucune émotion. Et pourtant la tristesse a depuis longtemps laissé sa place au désespoir et à la solitude. 

Je ne dors plus. Je ne pourrais pas j'ignore s'il fait nuit ou bien jour. Mais en vérité, j'ai tout simplement perdu la notion du temps. A mon poignet ma montre au bracelet en cuir ne fonctionne plus. Elle s'est arrêtée depuis le jour où tout a commencé, où je suis entrée dans ce gouffre. 

Parfois, j'entends des rires. Ceux de mes amis. Ils rient mais je ne peux pas les voir. Ce ne sont que des fantômes destinés à me faire perdre la raison. Ces rires fantômatiques que je ne peux plus supporter surviennent au moment où je me sens le plus mal.

Non loin de ma position se dessine un wakizashi, une arme japonaise ressemblant à un sabre. Chaque fois je suis tentée de le prendre et d'en finir. Mais je ne peux pas, je ne dois pas leur donner satisfaction aussi tôt. 

Qui d'ailleurs ? Qui mène ce jeu ridicule ? Je ne sais pas. Ce que je sais par contre c'est qu'une fois sortie de ce néant, si j'y parviens un jour bien entendu, je le tuerais. Je lui ferais comprendre le mal qu'il m'a fait, où qu'ils m'ont fait.

Mon coeur est si faible et si douloureux. Je sanglote en silence, regrettant mon passé si lointain déjà. Je suis si apeurée que je rejoins mes genoux contre ma poitrine. Est - ce un rêve ? Impossible, le durée est bien trop longue pour que cela en soit un.

Autant en finir maintenant. C'est tout. Voilà ma seule pensée. J'ai beau prendre l'arme que j'observe depuis longtemps, je n'ai jamais le courage d'aller jusqu'au bout. Mourir. Une verbe comme les autres qui est pourtant si ténêbreux.

L'obscurité est encore plus pesante et froide lorsque je me saisis de l'arme. Je prends le temps de regarder la lame finement taillée. Le manche de bois, tout, afin que mes derniers souvenirs ne soient pas imprécis. 

Après quelques minutes je me décide et la lame coupe soigneusement les veines de mon poignet. Je n'ai pas mal, étonnant n'est - ce - pas ? Tandis que mes vêtements s'innondent de sang je souris. Qui peut sourire le jour de sa mort ? Personne. Mais quand ce jour est une sorte de délivrance, alors on ne peut qu'être heureuse.

Souffrir éternellement n'est pas une solution après tout, en finir en est une bien meilleure.

Une goutte de sang plonge dans les ténêbres. Je l'observe tomber au plus profond du gouffre. Il est infini donc autant ne pas s'en préoccuper. 

Soudain, un minuscule bruit fait son apparition. Qu'est - ce donc ? Je fronce les sourcils. Que se passe - t'il ? Un changement s'opère on dirait ...

Je tombe brutalement sur le sol invisible à ma plus grande surprise. Je ne vagabonde plus dans le gouffre. Mes cheveux se posent et s'imprègne de mon sang lentement. J'observe la plaie de mon poignet. Elle est profonde, et pourtant je me rends compte que la solution était à porter de main depuis longtemps.

Les rires fusent à nouveau. Ils se moquent de moi, de ma bétise. Qu'importe je peux enfin me relever et marcher. Je tangue, depuis le temps que j'attends ça ! Marcher, courir, moi qui croyait que cela restait impossible !

Néanmoins, je ne suis pas pour autant sortie de ce dans quoi je me suis embarquée. J'ai beau essayé de chercher une issue je ne rencontre que des paroies invisibles sur lesquelles je me cogne. Sans que je ne le sache, je suis prisonnière pour toujours. J'aurais préféré tomber à jamais dans le néant plutôt que de devoir rester dans cette cage invisible. Mais le mal est fait.

Je me rappelle qu'on me répétait souvent que les erreurs sont faites pour éviter de les recommencer et pour se forger. Chaque erreur nous oriente vers une autre, pire peut - être. Mais au final on est toujours récompensée. Pourtant j'en doute. J'ai commis la pire erreur de ma vie ce jour là, et il m'est impossible de la rattraper. 

Je me rends compte que l'arme japonaise est éloignée de moi, comme si je ne devais plus m'en servir. Je rammène mes genoux contre ma poitrine en évitant de penser à l'ennui monstrueux qui m'attends. Je ne sais ni ou je suis ni ce que j'y fais. Je ne le saurais sans doute jamais. Le sang continue de tâcher mes vêtements sans que je ne fasse quoi que ce soit pour l'arrêter. A quoi bon ?

En cherchant bien je me surprends à trouver le nom de l'endroit dans lequel je suis. La réponse m'effraie bien plus que la question d'ailleurs. Je suis au Pays des Ombres, l'abysse infernal où s'échoue les âmes qui portent en elle une souffrance considérable. Une souffrance qui ronge tout.
Ici, chacun est condamné à y rester pendant l'éternité. C'est ce que mon père m'avait dit avant qu'il ne décède dans un mortel accident. Je comprends la raison de ma présence ici. 

Il m'avait dit aussi que pour en sortir - et rares sont ceux qui y arrivent - il fallait se vider de toute énergie négative. Mais je ne peux pas. Si jamais j'y parviens, je suppose que j'aurais perdu tous les êtres auxquels je tenais. Je le sais.

En cours d'écriture ...

Auteur : Clara M.